Commentaire de texte: « La loi sur le voile » marque l’aboutissement d’un long débat sur la laïcité.
Ce document, est un article presse extrait du journal Le Monde rédigé en mars 2004 par Luc Bronner.. Mise à par cela, il est intéressant de noter, que contrairement au reste de la grande presse quotidienne et hebdomadaire , celui ci s ‘est distingué sur ce sujet par une prise de position contre la logique prohibitionniste (dans un éditorial non signé dès le 18 juin 2003, puis tout au long du débat jusqu’au vote de la loi). Ainsi on peut se demander dans quel mesure le débat et le vote de cette loi peuvent être comparés aux premières lois sur la laïcité? Si oui, dans quelle mesure? Quel sont ces précédents et son cheminement et que reflète t’elle? Ainsi l’on va voir en premier lieu les relations qu’entretien cette loi du point de vu des premières lois votées au XIX ème siècle et du contexte actuel. En second lieu, la série de débat débouchant sur la commission Stasi. Et finalement, la loi en elle même.
Tout d’abord, en ce qui concerne les principes et les causes avancées pour la loi. On remarque en premier lieu que la loi du 15 mars 2004 en continuité, et dans la logique des lois républicaines. En effet cette dernière a rapport avec le milieu scolaire et notamment les établissements publique du primaire et du secondaire (ligne 9/10) « interdisant le port de signe (…) dans les écoles, collèges et lycées publics » lieu traditionnel et privilégié du débat sur la laïcité. Fondée tout comme les lois promulguées dans la deuxième moitié du XIX ème siècle sur l’application de la pensé Républicaine. Ainsi l’on peut la mettre en parallèle de nombreuses lois sorties à peux prés 100 ans plus tôt ,ex : la loi Ferry du 28 mars 1882 établissant la laïcité dans les établissements public ou la loi Goblet de 1904 interdisant d’enseignement toute congrégation. Il intéressant de voir que tout comme au XIX ème siècle une tendance similaire, en effet, Paul Airiau constate que dans ces cas la, le mot « laïcité » est alors presque uniquement lié à l’enseignement, à tel point que « laïciser » est entendu comme la neutralisation religieuse de la forme, du contenu et du personnel de l ‘enseignement, allant dans une perspective de réalisation de la République, c’est à dire de l’autonomisation de l’individu.
Toutefois les causes avancées doivent être rattachées au contexte politique et social particulier de la France en 2004. La marque de ce contexte et prééminente dans l’article des ses premières lignes . Déjà en premier lieu, on peut constater que l’islam est la première concernée même si elle n’est pas la seule religion impliquée dans l’article de loi du 15 mars comme le fait ressortir le titre et l’article (l4/5) « la loi sur le voile ». L’islam étant considérée comme la seconde religion de France après le christianisme depuis le milieu des années 80 en comptant près de 1million d’adeptes .En effet, elle est apparue récemment dans le paysage français (mise à part la parenthèse algérienne) on l’associe à l’arrivé des dernières vagues massives d’immigration nord africaine remontant au début des années 1970 peux avant le choc pétrolier de 1975. Ce qui est important a constater ,car le problème du voile est ici posé en terme d’intégration comme l’indique le texte (l 31/32) « Confrontés à la montée des revendications communautaristes ou religieuses » ,cette association s’en trouve renforcée par le contexte politique intérieur et international. Pierre Ténavian pose notamment l’hypothèse d’une opération de diversion de l’opinion au vu des mouvements sociaux de printemps 2003 et de l’influence de l’idéologie dominante à l’échelle internationale « du choc des civilisation » hégémonique depuis le 11 septembre 2001 et lié à la politique sécuritaire du gouvernement.
Ensuite, cela nous en amène a s’intéresser aux causes mises en avant par le l’article pour la mise en place de cette loi. La raison principale évoquée est la revendication des chefs d’établissement scolaire (L31/32) « confrontés à la montée des revendications communautaristes ou religieuses » portant le nombre de contentieux entre élèves voilés et enseignants selon les chiffres officiels fournis par Hanifa Chérifi, la médiatrice de l’éducation nationale semblent infirmer cette affirmation, car il est passé de 300 à 150. Alors que le nombre d’élève portant le foulard augmentait sensiblement et que 83% des élèves portant le foulard ne suscitaient aucun litige, et seulement 4 exclusions (plus ou moins légal sur le plan juridique), ce qui pose la question des origines des revendication: de la base vers les médias et les pouvoir politiques entraînant le (L21/22) « sursaut laïque » du chef d’État ou l’inverse? En prenant l’exemple du Lycée Henri Wallon d’Aubervilliers qui a été en septembre 2003 le théâtre de la dernière affaire du voile avant le vote de la loi. On s’aperçoit que les élèves voilés y étaient déjà scolarisés sans que l’équipe enseignante y songe à en faire un conflit. Ce n’est qu’après la rentré qu’on rentre dans une logique d’affrontement. Ce qui est intéressant a observer vu l’importance disproportionné donné à ce problème et l’ampleur qu’il a prit par la suite.
Cette loi, est a la foi en apparence en continuité avec les lois Républicaines du XIX ème siècle de part la place prépondérante accordée aux établissements scolaires dans la laïcité. Toutefois ce constat reste à nuancer par un contexte particulier dans lequel une nouvelle religion, (l’islam) récemment fait son apparition dans le paysage français. La question de la laïcité se posant plus en terme d’intégration que de conflits de contrôle et de pouvoir avec une Église ou un quelconque clergé. Quand à la notion même de conflit celui ci reste très discutable. Toutefois cette question a provoqué de nombreux débats fortement médiatisés.
Dans les revendications formulées par les chefs d’établissement et les enseignants se trouve (L42/43) « la solution trouvée en 1989 par le Conseil d’État » dont ils se plaignent. En effet le 28 novembre 1989 Lionel Jospin face au même problème a sollicité l’avis du Conseil d’État en assemblée générale, sans lui demander de juger un projet de circulaire, de règlement de loi, en ayant ainsi fait un partenaire de la réglementation, il transcrit largement cet avis dans une circulaire du 12 décembre 1989.Celle ci a pour objectif de permettre la disparition à plus ou moins long terme du port du voile. En même temps , Lionel Jospin laisse la justice administrative, donc le conseil d’État, se transformer en juge du pouvoir disciplinaire des chefs d’établissement. Ainsi en renvoyant la décision au niveau du terrain et en se faisant juge de cette décision, le conseil d’État rend possible de nouvelles affaires qui vont éclater régulièrement comme l‘indique le texte (L75-76) « les années 1989-1995 se sont caractérisés par une série de conflit sur le voile » . Ici il est intriguant de voir dans quel sens a été interprété l’ostensibilité du foulard: (L55 à 60)« le port par des élèves de signes (…)n’est pas en lui même incompatible avec le principe de laïcité ».Cette liberté découle en fait d’une réflexion qui la rattache a la liberté d’expression enraciné dans la liberté de conscience, est la liberté religieuse. On arrive dans ce cas a la liberté donnée aux élèves d’avoir des convictions et de pouvoir en faire état supposé de pouvoir manifester publiquement sa religion. Mais le port de ceux ci sont interdits dans le cas ou ils sont « ostentatoires » ou créent « des troubles à l’ordre public ». Les limites posées sont celles du respect du pluralisme et de la liberté d’autrui, et des modalités structurelles du fonctionnement des établissements. La liberté d’expression empêche donc dans l’absolu, et pour le cas précis du voile ,l’interdiction de son port. Il y a sans doute l’idée que le voile en tant que tel ne peut être interprété par l’État . C’est donc dans un contexte précis dans l’établissement, qui permettra de juger si la liberté religieuse utilisée par l’élève dans le cadre de sa liberté d’expression met en cause le bon ordre ou porte atteinte à la liberté d’autrui.(cf. L70).
Une autre partie de l’article traite du contexte de 2002-2003 pour justifier l’ampleur qu’a prit cette affaire sur le plan médiatique. Quatre exemples sont mis en avant par l’article dont la plupart peuvent être rattachés à des amalgames ou à des erreurs d‘interprétation. Dans,(L86-87) « la montée des revendications identitaire »,comme dans l’allusion au (L88) « match Algérie-France » et encore plus (L88) « la seconde Intifada » .On voit, en reprenant une thèse d’Alain Duhamel que le foulard est perçu comme (cf.première partie) un marqueur de «communautarisme » associé à un autre terme: « totem » désignant le replis de l’individu sur un groupe social unique, défini par une seul marque identitaire, d’ou l’amalgame avec la seconde Intifada et le match France-Algérie et la mise en question de l’intégration que l’on relie (maladroitement?) à des événements qui se produit à quelques milliers de kilomètres de la. Il n’y a pas de lien cause à effet que l’on puisse établir directement, cependant, il est a noté que la rapidité des nouveaux moyens de communications et la profusion d’informations peuvent prêter à confusion voir amplifié le débat comme pour(L97) « l’affaire d’Aubervilliers » .La notion d’intégration et de revendications identitaires ce retrouve de même à l’allusion (L90) « des sifflets essuyés par Nicolas Sarkozy » lors du congrès de l’union des organisations islamique de France du 19 avril 2002 au Bourget dont on retient essentiellement l’interdiction du port du voile pour les photos d’identité relayés immédiatement par Luc Ferry, ministre de l’éducation national qui annonce une loi sur la laïcité à l’école.
Par la suite, le texte s’intéresse aux premières propositions allant dans la direction d‘une création d‘une loi sur la laïcité, dont le but indiqué est d’interdire le port (L104) « de signes religieux ostentatoires à l’école ». Ici on constate la tournure sémantique que va prendre le terme ostentatoire au débouché du débat débouchant sur la loi du 15 mars. L’on remarque que les premières propositions concrètes viennent de Jean Louis Debré, président de la chambre des députés qui crée une (L109) « mission d’information » parlementaire sur la question des signes religieux à l’école, le 4 juin 2003. Commission que l’on interprète par la volonté de manifestation de la compatibilité entre modernité économique et défense républicaine dans la logique de son humanisme moderne. Celle ci en conclu « l’interdiction de tout signe religieux ou politique des lors qu’il est visible ».L’ostensibilité d’un signe est ici interprété par sa visibilité ce qui est d’autant plus important que l’on va retrouver un sens proche dans la loi du 15 mars . Le développement du thème de la laïcité, relève par la suite, d’une stratégie politique délibérée et récupérée par Jacques Chirac qui, le 30 juin 2003, par un communiqué informe qu’il met en place une commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République, confié à (L120) « B. Stasi » , médiateur de la République.
Les solutions trouvés au terme du premier débat de 1989 est assez consensuel quoique trop incertain car laissant place à d’autres affaires du voile de part ses positionnements trop floues. Ce dernier ressurgi en 2002-2003 sur le plan médiatique sous le couvert des questions d’intégration et de conflits (avec plus ou moins d’amalgame). Les premiers projets de loi viennent de gauche et de la commission Debré, pour être repris par le président de la République. C’est la commission Stasi puis J.Chirac qui va donner le visage définitif de cette loi.
En premier lieu, l’article se penche sur les perspectives donnée à la commission Stasi notamment au travers du discours d‘installation du 3 juillet 2003. Ce dernier reprend de façon synthétique au communiqué du 30 juin 2003 bien que ce dernier soit plus officiel et a des objectifs plus précis: la lettre de commission pose des objectifs ambitieux comme réfléchir sur « les exigences concrètes qui doivent découlées pour chacun du principe de laïcité » en insistant immédiatement après sur les restrictions, c’est à dire l’école qui est au premier rang, et c’est bien d’une solution définitive de la question du voile que veut le président de la République, et attend des expressions concrètes sur « l’expression des convictions religieuses de chaque français »,et évoquant les prescriptions cultuelles et fêtes religieuses. Le discours du 3 juillet quand à lui, est plus général et plus ambitieux: réfléchir au moyen de « concilier l’unité nationale et la neutralité de la république avec la reconnaissance de la diversité(…) ».C’est implicitement laissé entendre que la neutralité concerne toute la société, avec l’analyse sous jacente que l’affirmation croissante d’identités revendiquant une reconnaissance débouche sur des risques de tensions remettant en cause la vie paisible comme la fait remarquer Paul Airiau.
La commission dont les conclusions sont publiées le 12 novembre 2003 et le rapport intégral le 4 décembre (Le rapport de la commission est assez long, plus de 60 pages), débouche notamment sur les propositions de loi du (L132) « 11 décembre 2003 ». Elle est favorable à une loi interdisant les signes religieux quels qu’ils soient, dans tout les établissements publics et sous contrat avec l’État (L133) « une loi prohibant les signes d’appartenance religieuse (…) » . Il est difficiles de sortir des termes du débat sur l’école puis 89-90: intégration des immigrés, respect de la diversité culturelle ce qui peut expliquer l’allusion aux fêtes de Yom Kippour et l’Aid el-Kébir… Sa dépendance explique qu’elle ait pu être instrumentalisée par le président de la République. Lors de son discours du 17 décembre 2003, qui entend clore son travail de réflexion et le débat antérieur. J-Chirac ne retiens du rapport Stasi que quelques propositions, essentiellement (L145)« d’un projet de loi interdisant les signes « ostensible » ».
Sans reprendre textuellement les termes du rapport, il s’inscrit délibérément dans sa filiation, qui reprend de façon moins ambitieuse la charte de la laïcité ou il reprend quelques points en ce qui concerne la réglementation du port de signes religieux dans les entreprises, l’impossibilité législative de choisir son médecin etc. Mais la question du voile reste prioritaire Le 28 janvier, le conseil des ministres adopte un projet de loi relatif à l’application du principe de laïcité dans les écoles, collèges, lycée publics. Le 3 février, le débat est ouvert à l’Assemblé Nationale, sur un texte qui fait finalement après un amendement, l’objet d’une grande unanimité (L149) « (494 députés pour, 36 contre) » comme l‘indique l‘article de presse. Le 10 mars il est adopté en première lecture. Le 15 mars après son adoption au Sénat, la loi n°2004-228 « encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes de tenues manifestant une appartenance religieuse », reprise dans l’article Le Monde important de citer: « le port de signe (…) par lesquels les élèves manifestent ostensiblement » ou l’on remarque la tournure définitive qu’a pris le terme ostentatoire déjà remarqué (cf partie deux troisième paragraphe). Elle modifie l’article L.141-5-1 du Code de l’éducation votée en 89. Elle est publiée au journal officiel le 17. La circulaire du ministère de l’éducation nationale n°2004-84 du 18 mai 2004, publiée au journal officiel le 22, précise les modalités d’application, reprenant un certain nombre d’expressions du discours du président de la République le 17 Décembre
L’article de Le Monde est assez révélateur de l’état d’esprit dans lequel l’on se trouve en France au début du vingt et unième siècle : bien que l’on puisse établir une certaine continuité avec les premières lois Républicaines du XIX ème siècle notamment par le lien qu’ entretien la notion de laïcité et le milieu scolaire (lieu traditionnel de débat des Républicains avec le clergé ).Celle ci doit être remise dans son contexte, avec l’arrivé récente d’une forte minorité nord africaine ainsi que de l’islam, à tel point qu’elle devient des le milieu des années 80 la seconde religion de France. Ce qui pose des problèmes d’intégration dans le paysage français. Cependant, ce constat doit être nuancé au vu du contexte politique au niveau national et international qui peuvent prêter à confusion et dans lequel les médias jouent un rôle important. La question du voile se pose donc plus en ces termes, le foulard symbolisant la partie visible de l’islam. La solution de 89 est une sorte de compromis entre liberté de conscience et ostensibilité du port su voile en laissant l’établissement scolaire et le conseil constitutionnel en juge et interprète .En 2002-2003 cette affaire reprend de l’importance notamment sur le plan médiatique, et se dirige vers une solution plus radical visant à interdire les signes religieux dans les établissements scolaires. Le thème est tout d’abord traité par J.Louis Debré puis le président de la République qui décide d’établir une commission (Stasi) dont il va reprendre certaine de ces conclusion, et principalement l’interdiction du port du voile à l‘école. Mise à part le débat qu’a soulevé cette affaire, on constate qu’a un autre niveau, l’histoire qui a abouti au débat de 2004 révèle l’incertitude actuelle quant à la laïcité. Elle balance entre les fondements essentiel de la République, métaphysique sociale, et organisation juridique destinée à régler les questions religieuses. Ainsi la commission Stasi a proposé d ’étendre les principes de laïcité dans le milieu privé (les entreprises notamment) .Peut on dire que la question de la laïcité n’a pas été biaisée et déviée de ses principes originaux pour servir une politique et non plus la République ,contrairement à ce qu’a pu dire le président de la République lors de son discours du 17 Septembre?
NB: Fait en 2005-2006 lors du cour sur la laïcité de Mr Jacouty professeur d’histoire contemporaine à Paul Valéry
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