lundi 3 août 2009

Résumé de la thèse d'Owen CLUS: Condenseurs radiatifs de la vapeur d'eau atmosphérique (rosée) comme source alternative d'eau douce


L'élaboration et la mise en service de condenseurs de rosée n'est pas une chose simple, comme nous le démontre la thèse d'Owen Clus. Ce doctorant a soutenu en 2007 sa thèse intéressante dans le cadre de la recherche au sein de l’équipe Energies Renouvelables de l’université de Corse, sur le sujet, et a étudié les différents aspects à prendre en compte dans la conception d'un condenseur « idéal » tant d'un point vu technique qu'économique, de façon à rendre cette technologie abordable aux pays en voie de développement. Mais qu'est-ce que le processus de condensation de la rosée dont on parle ? L'auteur le défini ainsi: « Le phénomène de condensation peut se définir comme un prélèvement de chaleur dans un système à l’état gazeux tel que la baisse d’agitation des molécules de vapeur entraîne leur transition de phase en un état condensé liquide. » (page 12) Cela correspond , grosso modo à un transfert de chaleur, portant sur la différence thermique qu'il existe entre la surface d'un objet et l'air ambiant. Bien entendu, dans ces travaux, l'expérimentation est le maitre mot de ce travail dans lequel l'auteur s'adonne ou se réfère à de diverses expériences à travers le monde,travaillant sur de questions d'adaptabilité à divers écosystèmes: Croatie à Bisevo , en Polynésie sur l'atoll de Tikehau, en Inde à Panandhro dans la zone semi-aride du Kutch, bénéficiant saisonnièrement de moussons. Chaque zone géographique a ses spécificités prononcées, et le problème de l'eau est posée de différentes façons, selon l'utilisation qui en est faite, sa distribution, son accessibilité tant d'un point vu des ressources, que d'un point de vu économique. Il part ainsi d'études spécifiques sur la prise en compte de tout les facteurs à prendre en compte et établi le profil qui s'adapte le mieux aux conditions locales (peinture, films thermoplastiques), pour les rendre accessibles à tous.
I-Une recherche ambitieuse.

1-Une recherche dans la continuité de précédents travaux

Lphénomène de condensation de la rosée est observé depuis Aristote, mais sa captation date du début du XX ème siècle. Toutefois la technologie n'était pas encore au point, en effet, les structures massives empêchaient d'atteindre le point de rosée tant attendu; parmi ces capteurs de rosés on peut relever celui de Chaptal en 1932. Il faut attendre 1962, pour que le premier condenseur léger composé d’un film de polyéthylène soit testé en Israël, par Gindel1. Puis un plus d'un quart de siècle plus tard en 1994, d'autres tests sont faits par Nilsson2 dans le cadre de l'OPUR (Organisation Pour l’Utilisation de la Rosée) en Tanzanie. A partir de là, les expérimentations des condenseurs légers se multiplient à travers le monde, dont le Maroc (Mirleft, cf blog Debdou) fait parti. C'est dans cette mouvance qu'a été conçu cette thèse, à la fois en étudiant le phénomène, par des mesure et en développant les outils existant pour en tirer toute leur potentialité, tant sur les petites que sur les grandes superficies.

2-Des enjeux importants:

Les Réserves d'eau douces, sont évaluées à 35 millions de km³, soit 2,5% de la quantité d'eau disponible sous diverses formes telles que les glaciers, eaux souterraines (10,5 millions de km3), des rivières et lacs, les précipitations atmosphériques... Cette ressource est inégalement répartie, en effet c'est l'Amérique du sud qui comprend 1/4 des réserves mondiales, mais ne compte que 6% de la population, situation inverse en asie comprenant 60% de la population, mais peu de réserves hydriques, on parle alors de « stress hydrique » en dessous de 1700 m3 par an et par habitant. Ce qui est le cas pour 17% de la population mondiale, tant pour des raisons quantitatives, que qualitatives, en fait, la question de l'eau est très complexe!
Pour pallier le déficit hydrique, deux principales voies sont suivies :

1-) La première consiste à augmenter les aménagements hydrauliques ainsi qu’à développer les usines de production et traitement d’eau douce. C'est une solution répandue, mais qui coûte cher, tant économiquement, que sur le plan environnemental. Cela va du barrage, au déclenchement de pluies artificielles au Maroc et en Chine, en passant par le dessalement des eaux dans les pays du golf...

2-) La seconde consiste à repenser les usages des ressources hydriques, notamment dans les secteurs de l'agriculture (73% de la consommation en eau). On pense donc à toute les mesures d'économies et de recyclages de l'eau, mais aussi au niveau économique à sa marchandisation... Ce qui suscite de vives oppositions de principe.
Mais les objectifs du PNUD, fixés par l'ONU (diviser par deux le nombre de personnes souffrant de stress hydrique, ici 2015, est loin d'être atteint, bien au contraire, d'ou la recherche dans l'accès à des ressources en eau douce, dites alternatives. Celles qui devraient pouvoir y donner accès à tous de façon démocratiques en venant pallier des déficits hydriques plus ou moins brutaux.

D'ou l'idée d'exploiter les ressources hydriques atmosphériques, dont les réserves sont aussi importantes que celles existantes déjà sur les terres habitées soit 12500 km3. Celles-ci sont déjà exploitées dans le domaine des eaux de pluies, de brouillard dans les régions humides, en altitude. La nouveauté apportée est d'utiliser par les condenseur de rosée, dits condenseurs radiatifs, car ils jouent sur les propriétés d'absorptions et d'émissions des rayonnement radiatifs des matériaux provoquant la condensation de rosée la nuit ou à la levé du jour, en exploitant la vapeur d'eau atmosphérique. Cette technique pourrait servir de sources d'appoint, ou de principale lors des périodes de sècheresse.

II-La méthodologie abordée

Elle consiste en quatre principaux points:

1) Mise au point des matériaux plus performants pour la condensation de vapeur d’eau atmosphérique. Celle-ci existant sous forme de film ou de peinture à fort pouvoir radiatif, dont l'étude est faite durant toute la thèse d'Owen Clus par des formules et des expériences, menant à terme à un projet de brevet pour des matériaux radiatifs innovants.

2) mettre au point un outil d’aide à la décision pour le développement de condenseurs innovants par leurs formes et inédits par l’échelle des projets réalisés. Cela grâce au développement d'outils de simulation permettant de pallier le déficit de mesure ou autre (aspects pratiques et efficaces)
3) Approfondir l’étude de la ressource rosée disponible dans divers climats et zones géographiques a été prolongée et précisé en Polynésie Française sur les îles de Tahiti et Tikehau et sur une île de la mer Adriatique. Ce qui permet en partie d’expliquer ces écarts du gisement de rosée à partir d’exemples. On compte dans ce sens, des facteurs pouvant être favorables ou défavorables comme le vent, ou la nébulosité,car jouant sur la puissance de refroidissement disponible pour la condensation.

4) Une participation active à deux premières mondiales en terme de développement de la condensation de rosée par refroidissement radiatif, par un système de toiture en Croatie, par l'établissement d'une usine de rosée en Inde. Cette dernière expérience fut la plus prometteuse, et permet de produire de l'eau à bas prix, et ou il a été prévu de produire jusqu'à 5m3 d'eau pure par nuit!

III. Les résultats obtenus: des principes novateurs, de nombreuses perspectives!

Diverses raisons poussent à penser que le condenseur radiatif est promis à un brillant avenir:

1- 1/6 de l'humanité souffre d'un manque d'accès à l'eau, et cela ne va pas en s'arrangeant, d'ou le besoin croissant de ressources alternatives en eau. De plus cette méthode est applicable partout dans le monde « Nous avons vu que ces zones peuvent être aussi diverses que des îles calcaires méditerranéennes,des zones côtières arides marocaines, la région semi-aride du Kutch ou encore le Sud
montagneux du sous-continent indien, voir des atolls coralliens en climat tropical humide. » page 179

2- Elle permet de mettre à disposition une ressource jusque la inexploitée, en théorisant dans la continuité des autres recherches et en créant les conditions d'un transfert technologique. Comment? En formulant « des matériaux radiatifs et hydrophiles répondant aux exigences d’une utilisation et diffusion à grande échelle » page 179. Tout cela avec la mise au point de nouvelles techniques de mesure, l'accumulation d'un savoir faire avec la participation à deux premières mondiales en terme de développement de la condensation de rosée par refroidissement radiatif en Croatie et en Inde.
Conclusion: Cette thèse va permettre de développer la recherche sur le processus de condensation passive de rosée, en développant le procéder dans le but de le mettre à la disposition des populations qui en auraient besoins. Elle permet aussi d'obtenir un bonne place dans le domaine de la recherche (cf collaboration entre l’Université de Corse et de l’ESPCI ESEME-CEA équipe mixte de recherche sur les fluides supercritiques appliqués à l’environnement, les matériaux et l’espace.

NB: pour tout ce qui concerne l'explication théorique du phénomène physique de condensation radiative , je vous conseil de lire l'annexe I.1 sur les rayonnements et modèles de ciel, donnant des lumière sur le phénomène au niveau terrestre, mais aussi sur le phénomène d'effet de serre.
Je tiens aussi à remercier l'étudiant qui a mit le sujet de sa thèse en ligne, et dont propos sont très intéressants, et constructifs.

1 Gindel I., (1965). Irrigation of plants with atmospheric water within the desert. Nature, 5002, 1173–1175. Cf bibliographie Clus page 188.

2 Nilsson T. M., (1994). Optical Scattering properties of Pigmented Foils for Radiative Cooling
and Water Condensation: Theory and Experiment. Chalmers University of Technologie,
Göteborg, Sweden. PhD. Cf bibliographie Clus page 192.

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